Mine de BARA
BARA mine,
Figures explosives
Charcute, décortique
La chair de la peinture,
A bras le corps,
Dialogue entre la belle et la bête,
Le people et la bourgeoisie,
Le mâle et la femme,
La crise et la foi,
La jeunesse et la vieillesse,
Le doute et l’intuition,
Le plein et le vide,
L’os et la chair
L’intelligence du faire, sans mot,
Rentrer dans la peau peinture,
Le dur et le mou,
Poser de la manière animée sur la toile
Cinéma tragi-comique
Dialogue intérieur, souvenir écorché,
Tatouage du temps, trace de pinceau
Vanité contemporaine.
MANON
C’est une grande première à la galerie Russiantearoom : Liza Fetissova présente de la peinture ! Manon Bara, artiste française, vivant à Bruxelles, 30 ans, en couple, rouge à lèvre rouge, manucure bleue, généreuse, joyeuse, travailleuse.
La Rockeuse de Peinture débarque à Paris.
La peinture de Manon Bara, ça déborde de partout. Ça vous prend et ça vous hante. Ça vous séduit et ça vous dégoute. Ça vous réveille et ça vous émerveille. Ça rentre par les pores ou par les portes. Parfois, vous avez l’impression d’avoir pris un pot de peinture dans le visage. Ou pire, qu’un camion a déversé une tonne de peinture sur vous. Et oui, c’est ça, c’est le camion Manon Bara.
Manon Bara est une artiste multi disciplinaire, multi tâches, multifonctions. C’est une peintre jusqu'au bout des ongles. Elle peint sur différents supports, aussi bien des toiles que des jantes de voitures. Elle a fait 5 ans d’études aux Beaux-Arts d'Angers, 1 an à Dresde (où elle a appris la gravure) et 2 ans à la Cambre à Bruxelles. Française de naissance et de culture, allemande de la famille des expressionnistes, belge dans la vie et dans l'autodérision, elle aime bien « travailler le divertissement pour gens qui ont peur ». Elle fait une peinture pop cruelle, carnée, gourmande et généreuse.
« Lorsque je peins, je suis aveuglée, je m’immerge dans ce qu’il y a de plus douloureux. Pour moi, la peinture c’est une vierge qui a perdu son enfant. On est toujours en retard face à une peinture, à peine retournée, elle a déjà changé; séchée ».
Manon Bara sacralise et désacralise à la fois. Son approche est classique et, en même temps, post moderne, ce qui crée un réel paradoxe. Ce paradoxe permanent qui émane de ses peintures, crée de la tension et perturbe le spectateur.
A première vue, la peinture de Manon Bara est simple, voire simpliste; les sujets banals : une plante, un ours, des figues, des visages, des vieux, des mains de vieux, ah, tiens un Christ, et là - boxeurs, oh – des Vierges, et encore des bébés, des montagnes, un lapin, des autoportraits… On a quand même l’impression que ses figues ont le même groupe sanguin que le Christ ou les bébés. C’est le même sang rouge vif qui coule dans leurs veines, les cellules de chacun de ses sujets. Ils sont tous nés de Manon Bara- et ils portent tous le même ADN qu’elle.
La tension dans ses peintures est palpable : « cinéma tragi-comique, souvenir écorché et tatouage du temps. Plaie maquillage et pansement magique, la peinture saigne et soigne à la fois. Elle est encore vivante, centre nature morte et peinture fraiche ». La surface de ses peintures laquées est brillantes, comme des plaques emmaillées d’autrefois ; les aplats et les mélanges des couleurs sont audacieux ; mais dans ses superpositions et ses choix Manon Bara, en équilibriste, passe entre les gouttes du kitch, naïf, sans gêne et sort gagnante du grand prix de la Rockeuse de Peinture.
Manon Bara à certains sujets qui lui tiennent particulièrement à cœur : l’autoportrait, avec ses possibilités infinies autour d’un masque ; la gravure en tant que technique et langage, et la représentation de la chair, celle des bébés, des vieux ou encore des gros.
Toute peinture de Manon Bara étant autobiographique, c’est dans l’autoportrait qu'elle se permet d’aller le plus loin. Elle se peint en Vierge explosive, ou en mariée abandonnée, agonisante ; en ou encore tout simplement en femme, avec le visage couvert par un masque de beauté épaisse.
« Notre visage est le lieu où s’expriment nos sentiments. Dans l’autoportrait, plus on creuse l’intériorité, plus on parle d’universel ».
Les expressions qui animent le(s) visage(s) de Manon Bara sont comme un masque, figées et en mouvement à la fois. Et l’artiste leur offre encore un masque supplémentaire, artificiel, - un masque de beauté, ou un masque tribal, ou un masque de fête. Au final il n’y a pas de différence, le tout se mélange, le sens et la matière de la peinture laquée. « Le masque est ambigu, il cache autant qu’il révèle, il n’est ni transparent, ni opaque.
Maquillé, fardé, masqué, expression contraire, c’est sous le masque qu’on peut se dissimuler, survivre et être acceptés dans la société contemporaine »
La gravure permet à Manon Bara de rentrer dans la matière plate de la plaque en bois agglomérée. Ici, elle n’ajoute pas de couches, mais retire de la substance. La gravure est comme le squelette du dessin, l'os dur et la peinture charnelle. Les lignes sur les corps tatoués et les rides des vieux, eux-mêmes tatouages du temps, sont des sillons dans la peau, histoire de sa vie narrée sur soi...
Insatiable, gargantuesque, cette Manon Bara, elle prend la peinture, elle la mange, elle l’ausculte et en sculpte – de la chair, peu importe de la chair de quoi. Tout devient chair, cher à son regard. La peau en tant que forme et l’expression en tant que contenu, sont une matière mouvante, dans le temps, chaque seconde de la vie. Et Manon Bara a trouvé une technique pour nous raconter ce changement permanent, où les couches se mélangeant, se nourrissent, se parlent, se communiquent ; et la masse vivante, débordante, généreuse. Manon Bara fait de la peinture comme on fait de la cuisine : entrée, plat, dessert dans chaque toile. Dans chaque toile, une question, une réponse et encore une question ouverte.
L’artiste Manon Bara consiste en trois parties essentielles et inséparables : Manon Bara elle-même, femme-camion, entre rouge à lèvres et rage des dents, ensuite, il y a sa peinture et, pour finir, ses manifestes.
Ses manifestes, Manon Bara les écrit à la main sur une feuille A4. Et là, c’est une œuvre visuelle et littéraire. Elle les grave sur un sol en linoleum découpé, qui se déroule comme un tapis. Et là c’est une œuvre objet. Elle les lit aussi, avec un rythme donné par un batteur énergique, comme une rappeuse. Et là, c’est une œuvre happening.
Les manifestes de Manon Bara sont des œuvres à part entière. Une biographie poétique. Une explication de ses gestes de peintre. Des coups dignes d’un match de boxe, qu’elle aime tant. Ses manifestes, c’est à la fois une prolongation de son œuvre picturale, dans le geste qui dessine les lettres, dans les émotions couchées sur le papier. Mais c’est aussi une œuvre qui existe indépendamment, qui nous appelle à regarder ses peintures. C’est de la publicité dérangeante, un avant-goût qui passe par d’autres sens, un réveil, tonique une bousculade poétique.
Manon Bara et sa peinture, je n’en peux plus. Et quand je n’en peux plus, j’en mange encore et encore. Je crois que j’en suis boulimique. Attention ! Vous êtes prévenus !